Suites de nombres réels, première année de premier cycle universitaire

F.Gaudon

10 août 2005

Table des matières

1 Définitions
2 Opérations sur les suites convergentes ou divergentes
3 Suites extraites et valeurs d’adhérence
4 Comparaison de suites et limites
5 Suites adjacentes

Dans toute la suite, on se donne une suite (un)n de nombres réels.

1 Définitions

Définition :


  • Une suite (un)n est majorée s’il existe un nombre réel M tel que pour tout entier n un < M.
  • Une suite (un)n est minorée s’il existe un nombre réel m tel que pour tout entier n un > m.
  • Une suite (un)n est bornée si elle est majorée et minorée, c’est à dire si  E (m; M)  (- R2,  A n  (- N, m < u n < M.

Définition :


  • Une suite (un)n est croissante si pour tout entier n, un < un+1.
  • Une suite (un)n est décroissante si pour tout entier n, un+1 < un.
  • Une suite (un)n est stationnaire si il existe un entier N tel que pour tout entier n > N, un = uN.
  • Une suite (un)n est monotone si elle est croissante ou décroissante.

définition :


Une propriété P(n) est vraie à partir d’un certain rang s’il existe un entier N tel que pour tout entier n > N P(n) est vraie.


Définition :


  • On dit que (un)n tend vers (ou converge ou a pour limite) l  (- R ssi
     A e, E N,  A n > N, |un - l|< e
  • Une suite pour laquelle il existe un réel l tel que la suite converge vers l est dite convergente. Une suite qui ne converge pas est dite divergente.
  • On dit que (un)n tend vers (ou diverge vers a pour limite) + oo (resp. - oo ) ssi
     A M  (-  R, E N  (-  N,  A n > N,un > M
    (resp. A M  (-  R, E N  (-  N,  A  > N, un < M )

Proposition :


Si (un)n a une limite l alors elle est unique . On la note lim n-->+ oo ou lim n.


preuve :

Nous ne traitons que le cas où (un)n possède deux limites finies distinctes l et l'.

Il existe alors e > 0 tel que ]l - e; l + e[ /~\ ]l'- e; l' + e[= Ø.

Comme (un)n tend vers l,  E  (- N/ A n > N,un  (- ]l - e; l + e[ ;.

De même,  E N  (- N/ A n > N',un  (- ]l'- e; l' + e[.

Par conséquent,  A n > max(N,N'),un  (- ]l - e; l + e[ /~\ ]l'- e; l' + e[ : contradiction.

Proposition :


Toute suite réelle (un)n convergente vers un réel l est bornée.


Preuve :

Puisque (un)n est convergente vers l, pour e = 1, il existe un entier n tel que pour tout entier n supérieur ou égal à N on a |un - l| < 1 donc -1 < un - l < 1 ou encore l - 1 < un < l + 1. Par conséquent, on a pour tout entier n, un < max{u0; u1; ...; uN-1; l + 1} et un > max{u0; u1; u2; ...; uN-1; l - 1}.

2 Opérations sur les suites convergentes ou divergentes

Proposition :


Soient c  (- R, (un)n et (vn)n deux suites réelles et l,l' (- R. On suppose que (un)n converge vers l.


Preuve : Pour tout e strictement positif, (un)n étant convergente,  E N1 > 0,  A n > N1, |un - l| < e
2. De même, (vn)n étant convergente,  E N2 > 0,  A n > N2, |vn - l| < e2.

Par suite,  A n > max N1; N2, |un + vn - (l + l')| < |un - l| + |vn - l'| < e ce qui montre que la suite (un + vn)n converge vers l + l'. Même méthode que précédemment. (vn)n étant bornée, il existe M > 0 tel que pour tout entier n, on a vn inférieur ou égal à M.

Comme (un)n converge vers 0, pour tout e strictement positif, il existe un entier N tel que pour tout entier n supérieur à N on a |un - 0| < e-
M.

D’où |unvn| < e
M-M ce qui montre que (unvn)n est convergente vers 0. Soit e > 0. (un)n et (vn)n étant convergentes, elles sont respectivement bornées par deux réels M et M'. On a pour tout entier n,

|unvn - ll'| = |unvn - unl' + l'un - ll'| < |un||(vn - l')| + |l'||un - l| puis M|vn - l'| + |l'||un-l|. On utilise ensuite la définition de la convergence des deux suites pour majorer |un - l| par -e-
2|l'| et |vn - l'| par -e-
2M . l'/=0 implique que |l'| > 0.

Comme (vn)n converge vers l', pour e = |l'|
 2, il existe un entier N tel que pour tout entier n supérieur ou égal à N on a |vn - l'| <  '
|l2|. Avec ||vn|-|l'|| < |vn - l'| on obtient donc ||vn|-|l'|| < |l'|
2 c’est à dire 0 < |l'|-|l'|
-2 < ||vn| ce qui assure que pour tout n supérieur ou égal à N, la suite (vn)n est bien définie.

Pour montrer la convergence, on utilise le fait que pour tout n entier supérieur ou égal à N, |-1
vn -1-
l'| = |-l'-
vnl'--vn-
vnl'|. (vn)n est minorée car convergente par un nombre m supérieur à 0 strictement à partir d’un certain rang. La convergence de (vn)n permet alors d’assurer que la quantitée ci-dessus peut-être rendue aussi petite que l’on veut ce qui justifie la convergence de (v1
 n)n vers l1'. On utilise ensuite le produit de (un)n par (1-
vn)n pour obtenir la convergence de (un
vn)n vers l-
l'.

Proposition :


Soient (un)n et (vn)n deux suites réelles avec (un)n qui tend vers + oo .


3 Suites extraites et valeurs d’adhérence

Définition :


On appelle suite extraite (ou sous suite) de (un)n une suite dont le terme général est uf(n)f est une application strictement croissante de N dans lui même.


Définition :


Soit a  (- R U {- oo ; + oo }. On dit que a est une valeur d’adhérence de la suite (un)n ssi

 A e > 0, A N  (-  N,  E n > N,|un - a| < e

Proposition :


Les assertions suivantes sont équivalentes :


Preuve :

Remarque :

Un point a est adhérent à une partie A de R ssi tout intervalle de la forme ]a - e; a + e[ avec e > 0 contient un point de A.

Il ne faut pas confondre ici valeur d’adhérence de la suite (un)n et point adhérent à l’ensemble {un/n  (- N} : toute valeur d’adhérence de la suite est point adhérent à {un/n  (- N}. mais la réciproque est fausse : ainsi toute valeur up de la suite est adhérent à {un/n  (- N} mais n’est pas en général valeur d’adhérence de (un)n.

Proposition :


(un)n tend vers une limite l ssi toute suite extraite tend vers l.


Preuve :

Si toute suite extraite tend vers l, en particulier (un)n tend vers l.

Réciproquement, si (un)n tend vers une limite l que l’on supposera finie, les autres cas se démontrant de la même manière, on se donne une suite extraite (uf(n))n de la suite (un)n.

Alors  A e > 0, E p  (- N, A n > p,|un - l| < e donc, f étant strictement croissante de N dans N on a f(n) > n pour tout n  (- N et donc |uf(n) - l| < e pour tout n > p.

Exemple :

(un)n définie par un = sin(np
 7) n’est pas convergente.

Preuve :

En effet, u14n = sin(14np
 7) = sin(2np) = 0 pour tout n  (- N donc (u2n)n converge vers 0 alors que u14n+1 = sin((14n+71)p) = sin(2np + p7) = sin(p7)(-1)2n = sin(p7) pour tout n  (- N et (u14n+1)n converge donc vers sin(p
7).

Exemple :

(un)n converge vers l ssi les suites extraites (u2n)n et (u2n+1)n convergent vers l.

Preuve :

La condition nécessaire est évidente d’après la proposition III. Supposons donc que (u2n)n et (u2n+1)n tendent toutes les deux vers la même limite l.

 A e > 0, E N1  (- N/ A n > N1,|u2n-1 - l| < e et  E N2  (- N/ A n > N2|u2n+1 - l| < e

On pose N = max{2N1; 2N2 + 1}. Pour tout n > N, si n est pair alors n = 2k et k > N1 donc |u2k - l| = |un - l| < e sinon n est impair, n = 2k + 1, k > N2 donc |u2k+1 - l| = |un - l| < e

4 Comparaison de suites et limites

Proposition :


Soient (un)n une suite réelle convergente, l  (- R sa limite et a  (- R.

  • S’il existe N1  (- N tel que pour tout n supérieur ou égal à N1, un est supérieur ou égal à a, alors l est supérieure ou égale à a.
  • S’il existe N2  (- N tel que pour tout n supérieur ou égal à N2, un est inférieur ou égal à a, alors l est inférieure ou égale à a.

Théorème "de la limite monotone" :


Si (un)n est croissante (resp. décroissante) alors : limn = supn{un} (resp. infn{un}) et (un)n est convergente ssi elle est majorée (resp. minorée).


Preuve :

Par définition de la borne supérieure,  A e > 0, E N  (- N,supn{un}- e < uN < supn{un} donc, (un)n étant croissante,  A n > N,supn{un}- e < uN < un < supn{un}. Même type de preuve pour le cas décroissant.

Théorème "des gendarmes" :


Soient (xn)n, (un)n et (yn)n trois suites réelles.

  • Si (xn)n et (yn)n convergent vers la même limite l et si  E N  (- N, A n > N,xn < un < yn, alors (un)n converge vers l.
  • Si (xn)n diverge vers + oo et  E N  (- N, A n > N,xn < yn alors (yn)n diverge vers + oo
  • Si (yn)n diverge vers - oo et  E N  (- N, A n > N,xn < yn alors (xn)n diverge vers - oo

preuve :

Proposition :


Soient (un)n et (vn)n deux suites réelles. Si à partir d’un certain rang un < vn et si (un)n tend vers + oo , alors (vn)n tend vers + oo .


5 Suites adjacentes

Définition :


Deux suites réelles (un)n et (vn)n sont dites adjacentes si les deux suites sont monotones, l’une croissante, l’autre décroissante et si (un - vn)n converge vers 0.


Proposition :


Deux suites adjacentes sont convergentes vers une limite commune.


Théorème des segments emboîtés :


Soit (In)n une suite de segments In = [an; bn] tels que

  • pour tout n  (- N, In+1 < In ;
  • (bn - an)n converge vers 0.

Alors il existe un réel l  (- R tel que  /~\ In = {l}.


Preuve :

Du fait que pour tout entier n, In+1 < In on déduit que an+1 > an et bn+1 < bn. La suite (an)n est donc croissante, la suite (bn)n décroissante. En outre, (bn - an)n converge vers à donc les suites (an)n et (bn)n sont adjacentes et sont donc convergentes vers une limite commune l.

S’il existe N  (- N tel que l/ (- IN, alors l > bN ou l < aN. On peut supposer que l < an, le raisonnement serait identique dans l’autre cas. Il existe donc e > 0 tel que pour tout n < N, l + e < aN < an c’est à dire l - an > e ce qui impose que (an)n ne converge pas vers l en contradiction avec ce qui a été justifié précédemment. Par conséquent  A n  (- N, l  (-  /~\ In.

Soit l'/=l, alors il existe e > 0 tel que |l - l'| > e. Or (bn - an)n étant convergente vers 0, il existe N tel que |bN - aN| < e
2. Si l' (- IN alors |l - l'| < |l - aN| + |l'- aN| < e2 + e2 < e, contrairement à ce qui précède. Donc l'/ (- In et  /~\ In = {l}.

Théorème "de Bolzano-Weierstrass" :


De toute suite bornée de nombres réels, on peut extraire une sous suite convergente.


preuve :

Soit (un)n une suite bornée. Il existe M  (- R tel que -M < un < M.

Construisons une suite (In)n d’intervalles de la forme [an; bn] vérifiant In contient une infinité de termes de la suite (un)n, le diamètre d(In) <1n
2(b0 - a0)d(In) désigne le diamètre de In et In+1 < In.

On pose a0 = -M, b0 = M et donc I0 = [-M; M] qui vérifie de manière évidente les trois conditions précédentes.

Supposons Ik = [ak; bk] construit jusqu’à un rang n.

Alors [an; an+bn
  2] ou [an+bn
  2; bn] contient une infinité de termes de la suite (un)n.

Si [an; an+bn
  2] contient une infinité de termes de la suite, on pose an+1 = an et bn+1 = an+bn-
  2 sinon on pose an+1 = an+bn
  2 et bn+1 = bn.

Dans les deux cas, In+1 < In et bn+1 - an+1 = bn-2an- <1221n(b0 - a0) <21n+1(b0 - a0) donc In+1 vérifie les trois conditions énoncées.

Par récurrence on construit donc la suite (In)n.

Construisons ensuite une sous suite (uf(n))n de la suite (un)n telle que  A n  (- Nuf(n)  (- In.

On pose f(0) = 0 et de manière évidente u0  (- I0 = [a0; b0]

Supposons construite jusqu’à un rang n, f(k)/0 < k < n vérifiant  A k < n - 1,f(k + 1) > f(k) et  A k  (- {0; ...; n}f(k)  (- Ik.

On a In+1 < In et In+1 possède une infinité de termes de la suite (un)n. Il existe donc p > f(p)/up  (- In+1. On pose alors f(n + 1) = p. et qui vérifie les conditions voulues. Par récurrence, on construite donc la suite (uf(n))n.

Par construction, cette sous suite converge vers  /~\ In qui est un singleton {l} avec l  (- R d’après le théorème des segments emboîtés.